Une citation :
"Une anaphore fidèle se définit comme une reprise lexico-syntaxique de
l'antécédent avec simple changement de déterminant : "Un chien... Ce chien..."
L'anaphore est infidèle quand l'anaphorique est lexicalement différent de
l'anaphorisé : "Un chien... L'animal..." L'anaphore est dite
conceptuelle ou encore résomptive quand l'expression
anaphorique condense ou résume le contenu de l'antécédent, celui-ci étant alors constitué d'un
syntagme étendu ou d'une phrase : "Les footballeurs français ont battu les brésiliens.
Cette victoire les a faits champions du monde"."
Dictionnaire d'analyse du discours sous la direction de patrick Charaudeau et Dominique Maingueneau, Seuil, 2002, p. 49.
On commencera par citer une mise au point de Dominique Maingueneau :
"La catégorie des pronoms est faussement évidente. Elle recouvre des fonctionnements sémantiques très variés : pronoms substituts, embrayeurs personnels, pronoms autonomes. On divise traditionnellement les pronoms en diverses classes (possessifs, indéfinis...), qui correspondent systématiquement à diverses classes de déterminants et qui posent chacune des problèmes spécifiques. Cette hétérogénéité se retrouve dans la variation morphologique des pronoms." (Précis de grammaire pour les concours, 2001, p. 265)
Effectivement, il convient, malgré des formes parfois identiques, de bien distinguer déterminants et pronoms.
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Déterminants Pronoms Définis
(le la, les)Personnels
(il, le lui...)Démonstratifs
(Ce, cette, ces)Démonstratifs
(celui-ci, ceci...)Possessifs
(mon, ton...)Possessifs
(le mien, le tien...)Indéfinis
(un, plusieurs...)Indéfinis
(plusieurs, quelques-uns...)Relatifs (archaïque)
(lequel homme)Relatif
(qui, auquel...)Interrogatif
(quel homme ?)Interrogatif
(lequel ? qui ?)
[Tableau également extrait de Maingueneau, 2001, p. 266]
On distinguera encore soigneusement les pronoms anaphoriques (représentants) et les pronoms déictiques (dits aussi "nominaux"), en les classant dans ces catégories selon leur rapport au contexte ou à la situation :
situation | contexte |
[appelée encore "contexte extra-linguistique"] | [appelé encore "contexte linguistique"] |
déictiques | anaphoriques |
nominaux | représentants |
renvoient à un élément situationnel "je, tu, personne, rien..." | renvoient à un élément du contexte : "il, elle,..." |
Attention : ce n'est pas la forme du pronom qui permet de le classer comme nominal ou comme représentant ; les phénomènes d'homonymie sont fréquents, ou, si l'on préfère, on dira que bien des pronoms peuvent être tantôt nominaux, tantôt représentants :
Exemple :
"Chacun pour soi" (nominal)
"Une colonne d'homme en armes est arrivée ; chacun portait un bouclier" (représentant)
L'accord en genre se fait surtout dans les représentants, quand les pronoms renvoient à un nom ou groupe nominal :
Exemple :
"Une femme est entrée : elle portait un grand sac noir".
"Un homme est arrivé : il semblait fatigué"
En français, les nominaux : "je", "tu", "me", "moi", etc. ne prennent aucune marque de genre, mais l'accord se fait avec le sexe des animés :
Exemple :
"Vous êtes intelligentes, mesdames"
"Tu es belle ce matin"
Ils prennent des formes diverses selon leur fonction. Ils connaissent également pour certains une variation en genre, en nombre, en personne. Nous avons évoqué déjà l'opposition fondamentale entre 1e et 2e personne d'une part, et 3e personne (appelée "non-personne" par E. Benveniste) d'autre part.
Ces différences sont à la fois d'ordre référentiel, morphologique et syntaxique :
pronoms 1ère et 2e personne | pronoms 3e personne | |
---|---|---|
référentiel | je, tu (situation) | il, elle (contexte) |
morphologique | - pas de variation en genre ; - les 1e et 2e personnes dites du pluriel, ne sont pas de véritables pluriels de "je" et "tu" ; "nous n'est pas constitué de plusieurs "je", mais d'un "je" plus un ou plusieurs "tu", d'un "je" plus un ou plusieurs "il" (ils) | - variation en genre : il / elle (sujet), le / la
(complément) ; - variation en nombre : ils / elles, les, leur... |
- une seule forme pour le clitique : il me voit / il me parle | - deux formes pour le clitique : il le voit / il lui parle (seule la 3e personne distingue un pronom pour le complément direct et un pronom pour le complément indirect) | |
syntaxique | lorsque l'on a un verbe à deux compléments, l'ordre des clitiques est : il me le donne / il te le donne (CI - CD) | l'ordre des clitiques est : "il le lui donne" (CD - CI) |
On distinguera encore formes conjointes et formes disjointes :
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L'opposition des formes conjointes et disjointes
"Les formes conjointes sont liées au verbe de façon étroite : elles ne peuvent en être séparées que par une autre forme conjointe, les éléments en et y (assimilables aux formes conjointes, voir plus bas), enfin l'élément ne dans le cas des formes de cas sujet : Je ne l'y vois pas ; donne-la-lui.
Inversement les formes disjointes sont séparées du verbe par une pause ou une préposition. Elles sont toujours susceptibles d'être remplacées par un nom propre : lui (Pierre), il travaille; ils se moquent de lui (Pierre), etc. Toutefois, moi et toi ne peuvent, compte tenu de leur statut spécifique (voir plus haut), être remplacés par un nom propre. En revanche, ils admettent l'apposition d'un nom propre : moi (toi), Pierre.
(extrait de Arrivé, Gadet, Galmiche, 1986, p. 498-499)
Le pronom "on" peut, dans des conditions particulières, servir de substitut à tous les pronoms. Il est surtout fréquemment utilisé comme substitut de "nous" (NB que "nous" reste la forme tonique unique dans tous les cas de détachement) :
Exemple :
"On est allé en promenade"
"Nous, on ne sait pas faire ça"
Un tableau résumera quelques exemples :
1ère pers. | "En publiant ce livre, on voudrait montrer..." (forme de modestie) |
---|---|
2e pers. | "Alors, mon petit, on a bien déjeuné ?" (forme dite hypocoristique : qui exprime une intention affectueuse) |
3e pers. | "On m'a volé mon parapluie" (pour éviter une désignation trop précise) |
4e pers. | "On est allé en promenade, on a vu un cheval..." (de plus en plus fréquent à l'oral, le "on" remplace partout le "nous"(1)) |
5e pers. | "On a bien travaillé ! (pour "vous avez...") je suis satisfait de vous." |
6e pers. | "C'est Mozart qu'on assassine", "On a encore augmenté les impôts" |
Aucun tableau n'est vraiment satisfaisant car la catégorie des "indéfinis" et fort peu homogène. Classiquement, on les représente selon un tableau de ce type, en reprenant l'opposition "nominaux/représentants" déjà présentée plus haut :
Ensemble vide | Singularité | Pluralité | Totalité | Distributif | |
---|---|---|---|---|---|
nominaux | personne nul rien | quelqu'une n'importe qui quelque chose | quelques-un(e)s certain(e)(s) | tout le monde tout | chacun |
représentants | aucun(e) nul(le) pas un(e) | (l')un(e) n'importe lequel | quelques-un(es) les un(es) certain(es) plusieurs | tous (toutes) | chacun(e) |
[Ce tableau est inspiré du tableau proposé par Arrivé, Gadet, Galmiche, 1986, mais n'est pas identique, de même que le tableau que nous avons présenté pour les déterminants indéfinis.]
Il existe également des susbstituts d'adverbes ou de
circonstants (compléments de verbe ou de phrase). On les appelle parfois
"pronoms adverbiaux" (cf. Arrivé, Gadet, Galmiche, 1986, p. 500) [on devrait peut-être dire des
"pro-adverbes !]. De fait, on distinguera deux catégories à nouveau comme pour les pronoms :
- des formes conjointes : ce sont celles que classiquement on appelle "pronoms adverbiaux" :
en et y. "En" remplace les formes introduites par "de" :
"Je viens de Paris" : "J'en viens"
"Il se souvient de cette aventure étonnante ; il s'en souviendra longtemps"
"Y" remplace les formes introduites par "à" :
"Je vais à Paris" : "J'y vais"
"A cette nouvelle exposition... j'y vais tout de suite."
- des formes disjointes : ce sont des formes substituts, mais plus "pleines" de sens que les stricts pronoms : on citera : "Ce jour-là", qui renvoie par exemple à "Le 25 février 1808", déjà présent dans le contexte, "là", "là-bas", etc. On citera : "là, il vit celui qu'il attendait", qui renvoie par exemple à "Dans la forêt, au pied d'un chêne...".
(1) Quand on tente d'"écrire" ces formes bien réelles, la question de l'accord est posé et on voit de
plus en plus chez les auteurs qui les utilisent : "on est allés en promenade", "on est arrivés au parc", voire
"on est arrivées au parc", s'il s'agit exclusivement de femmes. Lorsque les marques sont aussi phoniques,
et non pas seulement graphiques, on note indéniablement que l'accord au féminin s'entend et qu'il est une "évidence"
pour le locuteur natif. Ex. suggéré par un correspondant :
Q."- Vous venez au foot ce soir les filles ?"
R."- Non on ne peut pas. On est prises."