Quelques citations sur l'oeuvre littéraire
classées par ordre alphabétique des noms d'auteur.

ABCDEFGHIJKLMNOPQRSTUVWYZ

A

Alain

"Quand un poète vous semble obscur, cherchez bien, et ne cherchez pas loin. Il n'y a d'obscur ici que la merveilleuse rencontre du corps et de l'idée, qui opère la résurrection du langage." (Alain Propos de littérature, Éd. Gonthier, Médiations, p. 12)

Aron, Paul, Saint-Jacques, Denis et Viala, Alain, éd. : Le dictionnaire du littéraire

Journalisme : "Pratique historiquement très variable et protéiforme, le journalisme littéraire paraît échapper à toute tentative de définition. Ainsi, le terme peut aussi bien désigner la chronique littéraire que le grand reportage ; dans le premier cas, l'épithète "littéraire" renvoie à l'objet de la prose journalistique et, dans le second, à ses qualités de style et plus largement d'écriture. D'autre part, il peut se jouer dans des quotidiens, mais aussi dans des hebdomadaires et revues. Mieux vaut donc sans doute ne pas restreindre a priori la définition. On remarque en effet que les plus grands représentants de ce "genre", notamment Emile Zola et François Mauriac, ont autant pratiqué la critique littéraire que la chronique politique." (article "Journalisme", in Le dictionnaire du Littéraire, Paul Aron, Denis Saint-Jacques et Alain Viala, éds., 2002, PUF).

B

Baudelaire, Charles

"L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu." (Baudelaire : Le spleen de Paris, Garnier-Flammarion n° 136, p. 37)

"Le poète jouit de cet incomparable privilège, qu'il peut à sa guise être lui-même et autrui." (Charles Baudelaire, Le spleen de Paris, Garnier-Flammarion n° 136, p. 61)

Ben Jelloun, Tahar

"Les traductions sont comme les femmes. Lorsqu'elles sont belles, elles ne sont pas fidèles, et lorsqu'elles sont fidèles elles ne sont pas belles."

Bobin, Christian

"Peu de livres changent une vie. Quand ils la changent c'est pour toujours." (Christian Bobin, La plus que vive)

"...il ne faut jamais faire de littérature, il faut écrire et ce n'est pas pareil". (Christian Bobin La plus que vive, coll. "L'un et l'autre", Gallimard p. 96)

Boileau, Nicolas

"Il est certains esprits dont les sombres pensées
Sont d'un nuage épais toujours embarrassées;
Le jour de la raison ne le sauroit percer.
Avant donc que d'écrire apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément."
(Boileau, Art poétique, chant I)

Borges, Jorge Luis

"Penser, analyser, inventer ne sont pas des actes anormaux, ils constituent la respiration normale de l'intelligence. Glorifier l'accomplissement occasionnel de cette fonction, thésauriser des pensées anciennes appartenant à autrui, se rappeler avec une stupeur incrédule que le doctor universalis a pensé, c'est confesser notre langueur ou notre barbarie. Tout homme doit être capable de toutes les idées et je suppose qu'il le sera dans le futur." (Borges, Jorge Luis : "Pierre Ménard, auteur du Quichotte", in Fictions, Folio n° 614, p. 73)

Bourdieu, Pierre

"Les luttes qui opposent les écrivains sur l'art d'écrire légitime contribuent, par leur existence même, à produire la langue légitime, définie par la distance qui la sépare de la langue "commune" et la croyance dans sa légitimité." (Pierre Bourdieu, Ce que parler veut dire)

C

Camus, Albert

"L'art vit de contrainte et meurt de liberté." (Albert Camus, Le discours de Suède, p. 62)

Chamoiseau, Patrick

"Le Cahier [d'un retour au pays natal, Aimé Césaire] est une belle secousse lyrique dans laquelle Césaire raconte son retour au pays natal, pays géographique des Antilles, mais aussi pays fondateur, l'Afrique. Il y procède à une description des ruines engendrées par la colonisation dans et autour de lui, et détruit les barrières dressées par la domination brutale entre lui et son pays natal, entre lui et l'Afrique, entre lui et son essence nègre, entre lui et sa parole vraie. Le Cahier, après une descente orgueilleuse dans l'enfer colonial, s'achève en une assomption grandiose où le poète proclame sa Négritude-humanité, avec une force incantatoire qui ébranlera les assises du monde. Un souffle de baptême pour les colonisés du monde, battus et opprimés, et pour les Nègres bien sûr." (Chamoiseau, Patrick, 1997 : Ecrire en pays dominé, Gallimard, p. 53)

Cheng, François

"Je considère qu'une analyse, trop lucide, trop méthodique, trop formelle, nuit à la création. Aussi bien en tant que poète que romancier, il est bon que la matière d'un drame comporte sa part d'obscurité et de mystère. Le propos du créateur est d'aller aussi loin que possible dans l'élucidation de ce mystère tout en se laissant déborder par ce que ce mystère contient de résonance infinie. La vraie création est un combat avec l'ange. On ne prétend pas en sortir vainqueur. Au contraire, on s'anéantit dans la création en laissant la part non maîtrisable continuer son chemin." (François Cheng, entretien par Catherine Argand dans Lire, décembre 2001, janvier 2002)

"Le diamant du lexique français, pour moi, c'est le substantif "sens". Condensé en une monosyllabe - sensible donc à l'oreille d'un Chinois - qui évoque un surgissement, un avancement, ce mot polysémique cristallise en quelque sorte les trois niveaux essentiels de notre existence au sein de l'univers vivant : sensation, direction, signification." (François Cheng, Le Dialogue, Desclée de Brouwer, 2002, Dédicace.)

"Une langue, n'est-ce pas, c'est quelque chose qui vous est donné en vrac, sans réserve aucune, qui depuis votre naissance vous permet de tout dire, de raconter tout ce qui vous passe par la tête, de décrire aussi tout ce qui se fait dans le monde extérieur. Cela devrait donc être quelque chose d'évident, d'universel, d'immédiatement accessible à nous. Et pourtant, force nous est de constater, avec stupéfaction, qu'il n'y a pas de système constitué plus étanche, dressant des barrières aussi sévèrement gardées, difficilement franchissables aux yeux de quelqu'un qui n'a pas la chance de "naître dedans". Passé la stupéfaction, on se rend compte alors d'un autre aspect de toute langue, qui fait justement sa complexité et son mystère. C'est qu'un idiome n'est pas seulement un instrument objectif de désignation et de communication ; il est également le moyen par lequel chacun de nous se fait progressivement, ce par quoi chacun se forge un caractère, une pensée, un esprit, un monde intérieur mû par des sensations et des sentiments, des désirs et des rêves. Une langue prend en charge notre conscience et nos affectivités. Et à un degré plus haut, elle est ce par quoi l'homme est à même de se dépasser en accédant à une forme de création, puisque toutes nos créations, au sens large, sont un langage. Je parlais du mystère du langage humain ; je suis prêt à affirmer à présent que c'est dans le langage, toujours au sens large, que réside notre mystère. C'est bien au moyen de notre langue, à travers notre langue, que nous nous découvrons, que nous nous révélons, que nous parvenons à nous relier aux autres, à l'univers des vivants, à quelque transcendance en laquelle certains d'entre nous croient." (François Cheng, Le dialogue, Desclée de Brouwer/Presses littéraires et artistiques de Shanghai, 2002, pp. 9-10)

"Ne pas exprimer directement ses sentiments, parce que directement on n'y arrive pas. On en dit bien plus par les images..." (François Cheng, L'éternité n'est pas de trop, Albin Michel, 2002, p. 213.)

"Dire, c'est certes ce qu'il est donné au poète, mais le vrai dire n'est-il pas une quête dont on ne peut encore mesurer la portée ni prévoir le terme ?" (François Cheng, Le dit de Tianyi, p. 372).

D

Djebar, Assia

"Au fond, tout mon travail de vingt à quarante ans a été de rechercher cette ombre perdue dans la langue française. Il y a deux sortes de perte : la perte qui vous hante et la perte que vous oubliez, l'oubli de la perte. Le terrible, c'est l'oubli de la perte." (Assia Djebar, L'Amour, la fantassia (1985), Paris Albin Michel, 1995)

"J'ai tenté de retravailler la langue française comme une sorte de double de tout ce que j'ai pu dire dans ma langue du désir." (Assia Djebar, L'Amour, la fantassia, Paris, Albin Michel, 1995

Duras, Marguerite

"Il y aurait une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture de mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Égarés. Là, écrits. Et quittés aussitôt." (Marguerite Duras, Écrire, Folio n° 2754, p. 71)

"Écrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit." (Duras, Marguerite : Écrire, Folio n° 2754, p. 28)

E

Echenoz, Jean

"[...] sur le plan de la mise en scène des récits, je me sers de la rhétorique cinématographique. Je fais appel instinctivement à des repères de l'ordre des outils poétiques, de la césure, de la syncope. Je pars d'un manuel de rhétorique ou de métrique pour importer telle ou telle figure. A une époque, le mécanisme de ces choses me séduisait beaucoup. Il y a quelque temps, j'ai comparé dans une conférence le système des temps grammaticaux à une boîte de vitesses. L'image du roman comme un moteur de fiction, qui quelquefois se met à faire bizarrement de l'autoallumage, est une idée qui me séduit en ce moment. Mais, comme toute chose systématique, il faut en même temps aller contre. Et puis, ce sont des moteurs guettés par des risques de dysfonctionnements."

(Jean Echenoz, sur le site : http://www.remue.net/cont/echenoz.html)

Ernaud, Annie

"J'ai toujours eu envie d'écrire des livres dont il me soit ensuite impossible de parler, qui rendent le regard d'autrui insoutenable..." (Annie Ernaux, L'écriture comme un couteau)

F

Flaubert, Gustave

"L'artiste doit être dans son oeuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout-puissant, qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas." (Flaubert, lettre à Melle Leroyer de Chantepie, 18 mars 1857, in Gustave Flaubert : Préface à la vie d'écrivain. Extraits de la correspondance, présentation et choix par Geneviève Bollème, Paris, Seuil, 1990, p. 188)

Foucault, Michel

"De la révolte romantique contre un discours immobilisé dans sa cérémonie, jusqu'à la découverte mallarméenne du mot en son pouvoir impuissant, on voit bien quelle fut, au XIXe siècle, la fonction de la littérature par rapport au mode d'être moderne du langage. Sur le fond de ce jeu essentiel, le reste est effet ; la littérature se distingue de plus en plus du discours d'idées et s'enferme dans une intransitivité radicale." (Les Mots et les Choses, Paris, Gallimard, coll. "Tel", 1966, p. 313.)

G

Genette, G.

"Il n'est pas tout à fait sûr que l'emploi des sons et des couleurs suffise à définir la musique ou la peinture, mais il est certain que l'emploi des mots et des phrases ne suffit pas à définir la littérature, et encore moins la littérature comme art." (G. Genette, Fiction et diction, Paris, Editions du Seuil, 1991, p. 12)

Golder, C. et Gaonac'h, D.

"La compréhension est une interprétation : nous interprétons en permanence l'information que nous lisons. En d'autres termes, la signification du texte ne peut pas être extraite de ce dernier ; elle doit être construite par un lecteur actif qui, pour cela, fait intervenir ses connaissances afin d'élaborer des inférences. Les processus inférentiels sont centraux dans l'activité de lecture. En effet, l'information donnée dans le texte, ou du moins les relations entre ces informations restent souvent implicites. Il revient alors au lecteur la lourde tâche d'établir des inférences pour les rendre explicites." (Golder, C. et Gaonac'h D., 1998 : Lire et comprendre, psychologie de la lecture, Paris, Hachette, coll. Profession Enseignant, p. 96).

H

Hazaël-Massieux, Marie-Christine

"Le sens d'un mot, sauf lorsqu'il s'agit d'un élément terminologique qui ne comporte qu'un seul sens et une seule définition dans le dictionnaire (cf. tous les termes techniques), est toujours difficile à atteindre et à formuler : de fait un mot a le plus souvent plusieurs sens : il est polysémique, et ces sens sont, comme on a pu le souligner, faits de l'ensemble des contextes d'utilisation du mot en question. Des associations contribuent à forger le sens complet du mot, c'est-à-dire ses dénotations et connotations souvent nombreuses, bien au-delà de la référence la plus immédiate ; pour chacun des utilisateurs, les significations attachées à un mot s'étendent au fur et à mesure que son expérience croît, et un lexicographe, bien conscient de cela, a souvent du mal à ne retenir que trois ou quatre définitions pour "donner une idée du mot" dans l'entrée qu'il établit dans le dictionnaire." (Marie-Christine Hazaël-Massieux : "'Allez donc, de toutes les nations faites des disciples...' A propos de la traduction de la Bible en créole.", in Pierre d'angle, Pierre d'angle, France, Aix-en-Provence, 2000, pp. 86-108)

Hugo, Victor

"Combien de malheureux, qui auraient pu mieux faire, se sont mis en tête d'écrire, parce qu'en fermant un beau livre, ils s'étaient dit : J'en pourrais faire autant ! et cette réflexion-là ne prouvait rien, sinon que l'ouvrage était inimitable. En littérature comme en morale, plus une chose est belle plus elle semble facile. (Victor Hugo, "Littérature et philosophie mêlées" OEuvres complètes, Robert Laffont - Bouquins 1985, p. 107)

K

Kundera, Milan

"La beauté d'un mot ne réside pas dans l'harmonie phonétique de ses syllabes, mais dans les associations sémantiques que sa sonorité éveille. De même qu'une note frappée au piano est accompagnée de sons harmoniques dont on ne se rend pas compte mais qui résonnent avec elle, de même chaque mot est entouré d'un cortège invisible d'autres mots qui, à peine perceptibles, corésonnent." (article "Ensevelir" dans L'Art du roman, Folio n° 2702, p. 153)

"Le roman n'examine pas la réalité mais l'existence. Et l'existence n'est pas ce qui s'est passé, l'existence est le champ des possibilités humaines, tout ce que l'homme peut devenir, tout ce dont il est capable. (Milan Kundera, L'art du roman, Folio n°2702, p. 57)

"D'après une métaphore célèbre, le romancier démolit la maison de sa vie pour, avec les briques, construire une autre maison : celle de son roman. D'où il résulte que les biographes d'un romancier défont ce que le romancier a fait, refont ce qu'il a défait. Leur travail, purement négatif du point de vue de l'art, ne peut éclairer ni la valeur ni le sens d'un roman il peut à peine identifier quelques briques." (Kundera, L'art du roman, Folio, Gallimard, p. 178

"Il y a une différence fondamentale entre la façon de penser d'un philosophe et celle d'un romancier. On parle souvent de la philosophie de Tchekhov, de Kafka, de Musil, etc. Mais essayez de tirer une philosophie cohérente de leurs écrits ! Même quand ils expriment leurs idées directement, dans leurs carnets, celles-ci sont plutôt exercices de réflexions, jeux de paradoxes, improvisations que l'affirmation d'une pensée." (Kundera, Milan : L'art du roman, Folio n° 2702, p. 97)

"L'oeuvre de chaque romancier contient une vision implicite de l'histoire du roman, une idée de ce qu'est le roman ; c'est cette idée du roman, inhérente à mes romans, quej'ai essayé de faire parler" (Milan Kundera : épigraphe à L'art du roman).

Pseudonyme : Je rêve d'un monde où les écrivains seraient obligés par la loi de garder secrète leur identité et d'employer des pseudonymes. Trois avantages : limitation radicale de la graphomanie ; diminution de l'agressivité dans la vie littéraire ; disparition de l'interprétation biographique d'une oeuvre." (Kundera, L'Art poétique, Folio, p. 172-173).

"D'après une métaphore célèbre, le romancier démolit la maison de sa vie pour, avec les briques, construire une autre maison : celle de son roman. D'où il résulte que les biographes d'un romancier défont ce que le romancier a fait, refont ce qu'il a défait. Leur travail, purement négatif du point de vue de l'art, ne peut éclairer ni la valeur ni le sens d'un roman il peut à peine identifier quelques briques." (Kundera, L'art du roman, Folio, Gallimard, p. 178

"Roman :La grande forme de la prose où l'auteur, à travers des ego expérimentaux (personnages), examine jusqu'au bout quelques thèmes de l'existence." (Kundera : L'art du roman, Folio, p. 175).

M

Maingueneau, Dominique

"...il n'existe pas de langue littéraire, mais un usage littéraire de la langue." (Dominique Maingueneau, 1990 : Pragmatique pour le discours littéraire, Dunod, p. 183.

Mallarmé, Stéphane

"... l'écriture [n'est] que la fixation du chant immiscé au langage et lui-même persuasif du sens." (Stéphane Mallarmé, "Divagation première : Relativement au vers", in Vers et Prose, Livre de Poche, p. 168)

"L'oeuvre pure implique la disparition élocutoire du poète, qui cède l'initiative aux mots, par le heurt de leur inégalité mobilisés ; ils s'allument de reflets réciproques comme une virtuelle traînée de feux sur des pierreries, remplaçant la respiration perceptible en l'ancien souffle lyrique ou la direction personnelle enthousiaste de la phrase". (Mallarmé, ibid., p. 170).

Maupassant, Guy de

"Il n'est pas besoin du vocabulaire bizarre, compliqué, nombreux et chinois qu'on nous impose aujourd'hui sous le nom d'écriture artiste, pour fixer toutes les nuances de la pensée ; mais il faut discerner avec une extrême lucidité toutes les modifications de la valeur d'un mot suivant la place qu'il occupe. Ayons moins de noms, de verbes et d'adjectifs aux sens presque insaisissables, mais plus de phrases différentes, diversement construites, ingénieusement coupées, pleines de sonorités et de rythmes savants. Efforçons-nous d'être des stylistes excellents plutôt que des collectionneurs de termes rares." ("Le roman", préface à Pierre et Jean).

Molinié, Georges

"Un cliché est une figure (en général microstructurale) banalisée par la répétition de son usage : c'est donc un stéréotype d'expression ; mais on pourrait concevoir des stéréotypes de contenu." (Georges Molinié, Dictionnaire de rhétorique, Livre de Poche, p. 81.

"Le discours littéraire est [...] bien en lui-même une totalité de fonctionnement sémiotique, qui se régule entièrement, et dualement, sur son propre système." (Georges Molinié, in Georges Molinié et Alain Viala, 1993, Approches de la réception PUF, p. 19.)

N

Nyssen, Hubert

"Toute littérature est traduction. Et traduction à son tour, la lecture que l'on en fait... D'où cet autre sentiment selon lequel on n'en aura jamais fini avec les textes que l'on aime, car ils rebondissent d'interprétation en interprétation..." (Hubert Nyssen Éloge de la lecture, coll. Les grandes conférences, éd. Fides, 1997, p. 17)

P

Proust, Marcel

"Je préfère la concentration, même dans la longueur" (Lettre de Proust à Jean Cocteau, 11 fév. 1919, citée par Jean Milly, La phrase de Proust, Paris, Larousse université, 1975).

S

Saint-John Perse

"Et le Poète aussi est avec nous, sur la chaussée des hommes de son temps.
Allant le train de notre temps, allant le train de ce grand vent.
Son occupation parmi nous : mise en clair des messages. Et la réponse en lui donnée par l'illumination du coeur.
Non point l'écrit, mais la chose même. Prise en son vif et dans son tout.
Conservation non des copies, mais des originaux. Et l'écriture du poète suit le procès-verbal."
(St-John Perse, Vents, 6)

Q

Quignard, Pascal

"Sans lien avec le souffle la virgule et le point sont sans doute comme le symptôme écrit de la grammaire et de la soustraction de l'oral." (Pascal Quignard, Petits traités I, Folio, p. 57)

R

Rimbaud, Arthur

"Je dis qu'il faut être voyant, se faire voyant. Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens." (in Lettres du voyant commentées par Gérald Schaeffer, Genève/Paris, Droz/Minard, 1975, p. 134).

"A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes..."
(Rimbaud : "Voyelles")

Robbe-Grillet, Alain

"Une explication, quelle qu'elle soit, ne peut être qu'en trop face à la présence des choses." (Alain Robbe-Grillet : Pour un nouveau roman)

S

Senghor, Léopold S.

"Nous, politiques noirs, nous, écrivains noirs, nous nous sentons, pour le moins, aussi libres à l'intérieur du français que dans nos langues maternelles. Plus libres, en vérité, puisque la liberté se mesure à la puissance de l'outil : à la force de création. Il n'est pas question de renier les langues africaines. Pendant des siècles, peut-être des millénaires, elles seront encore parlées, exprimant les immensités abyssales de la négritude. Nous continuerons d'y prêcher les images archétypes : les poissons des grandes profondeurs. Il est question d'exprimer notre authenticité de métis culturels, d'hommes du XXe siècle." (Léopold S. Senghor, 1962 : "Le français, langue de culture", in Esprit, novembre 1962.

Mme de Staël

"[...]Le gouvernement d'une conversation ressemble beaucoup à celui d'un Etat ; il faut qu'on se doute à peine de l'influence qui la conduit. L'administrateur et la maîtresse de maison ne doivent jamais se mêler des choses qui vont d'elles-mêmes, mais éviter les maux et les inconvénients qui viennent à la traverse, éloigner les obstacles, ranimer les objets qui languissent. Une maîtresse de maison doit empêcher que la conversation ne prenne un tour ennuyeux, désagréable ou dangereux ; mais elle ne doit faire aucun effort tant que l'impulsion donnée suffit et n'a pas besoin d'être renouvelée ; trop accélérer c'est gêner." (Mme de Staël, L'âge de la conversation).

T

Tournier, Michel

"... le livre est une création, et cette création comporte un premier et un second degré.
Au premier degré, j'invente une histoire et des personnages.
Au second degré, le lecteur s'en empare et poursuit cette création pour la faire sienne."
(Michel Tournier, "Réponse", in Petites proses, Folio, p. 219)

"Un poète, un romancier, un novelliste, un conteur ne donne au lecteur que la moitié d'une oeuvre, et il attend de lui qu'il écrive l'autre moitié dans sa tête en le lisant ou en l'écoutant. Les oeuvres littéraires les plus importantes selon moi sont celles qui ont suscité après elles une postérité renouvelée à chaque génération." (Michel Tournier, Journal extime, La Musardine, 2002, p. 166

Téléphone "Savoir maîtriser cet outil indispensable et tyrannique. Mon ami Wladimir Z. y est passé maître. il prétend par exemple reconnaître l'identité de la personne qui l'appelle à la quantité et à la qualité de la sonnerie. Il faut le voir quand le téléphone sonne : il s'immobilise comme frappé de stupeur et vous impose le silence. Le visage levé vers les moulures du plafond, l'air inspiré, il prononce quelques noms, hésite, tâtonne, revient, enfin brusquement tranche pour un tel ou une telle. Et bien entendu décide aussitôt de ne pas décrocher, car il a horreur qu'on lui fasse la violence de s'introduire chez lui de la sorte." (Tournier, Michel, Petites proses, Folio, p. 24)

V

Valéry, Paul

"Je ne veux jamais être obscur, et quand je le suis - je veux dire : quand je le suis pour un lecteur lettré et non superficiel -, je le suis par l'impuissance de ne pas l'être." (Paul Valéry, A Aimé Lafont, 1922)

"Le poème, hésitation prolongée entre le son et le sens" (Paul Valéry, Tel Quel II, "Rhumbs", Pléiade II, p. 637).

Verlaine, Paul

De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

Il faut aussi que tu n'ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise :
Rien de plus cher que la chanson grise
Ou l'Indécis au Précis se joint.

C'est de beaux yeux derrière des voiles,
C'est le grand jour tremblant de midi ;
C'est par un ciel d'automne attiédi,
Le bleu fouillis des claires étoiles !

[...]
Prend l'éloquence et tords-lui son cou !
Tu feras bien, en train d'énergie,
De rendre un peu la Rime assagie.
Si l'on y veille, elle ira jusqu'où ?
Ô qui dira les torts de la Rime !
Quel enfant sourd ou quel nègre fou
Nous a forgé ce bijou d'un sou
Qui sonne creux et faux sous la lime ?

[...]
(Verlaine : Art poétique)

Ce site a été réalisé par Marie-Christine Hazaël-Massieux.